Le 10 mars 2020, La Part Précaire de la Recherche (LPPR) s’est invitée à inauguration de l’exposition des 10 ans de l’ICM (Institut du Cerveau et de la Moelle épinière).
Nous reproduisons ici le texte qui a été lu à cette occasion et mettons à disposition une vidéo et des photos.

Mesdames, Messieurs, et les autres, bonjour !

C’est la LPPR qui vient ici vous saluer !
Oui nous sommes la LPPR ! Pas celle chère à Chimérique Vidal et Antoine Le Tout Petit, non.
Nous sommes La Part Précaire de la Recherche, les petites mains et les cerveaux qui font tourner la boutique, et que les médiocres manageur·ses du public et du privé voudraient voire corvéables et exploitables à merci.

Vous vous demandez pourquoi nous nous invitons à cette petite sauterie faite de discours pompeux et creux, de petits fours et de bulles.
C’est un peu le fruit du hasard : nous voulions d’abord apporter notre soutien aux membres du personnel hospitalier de la Pitié Salpêtrière : ces femmes et ces hommes qui, malgré un sous-financement chronique de l’hôpital public, accomplissent leur métier avec professionnalisme et épuisement.

Mais ielles nous ont dit que malheureusement ce n’était pas le bon moment, au seuil d’une épidémie virale. Ielles nous ont suggéré d’aller jeter un coup d’œil sur ce beau et jeune bâtiment.

En bons chercheurs et chercheuses précaires, c’est ce que nous avons fait. Et ce n’est pas l’espoir que nous avons découvert, comme nous le faisait miroiter votre récente campagne de pub, mais un mélange d’effroi, de sidération – mais aussi beaucoup de ridicule.
L’ICM, l’Institut du Cerveau et de la Moelle Epinière, pardon “sans moelle à partir d’aujourd’hui” est une idée magnifique, créée par des Hommes Magnifiques, oui des Hommes, seulement des Hommes !

Comme:
– Jean Todt : Président de la Fédération Internationale de l’Automobile, ami intime de l’Industrie du Tabac
– Maurice Lévy : Ancien PDG de Publicis, que nous remercions pour la beauté et la pertinence de publicités en oubliant sa fortune et la manière dont l’entreprise traite ses salarié·es.
– Jean Glavany : politicien de renom, ami intime de Mitterrand et du déchu Cahuzac.
– Luc Besson : grand cinéaste français, avec quelques casseroles au cul pour accusation de viol et harcèlement sexuel.

J’en passe et des meilleurs!

Nous n’allons pas jouer les coupeur·ses de cheveux en quatre et analyser les intérêts financiers d’une telle initiative, nous sourions de l’intérêt de ces Messieurs pour la recherche de remèdes aux maladies neurodégénératives qui pourraient les affecter et les empêcher d’exercer leur nuisance de manière lucide.

Ce que nous dirons c’est que le modèle de partenariat public/privé de l’ICM est à nos yeux un cauchemar :

  • Que vienne l’argent des riches pour la recherche publique, mais sous forme de l’impôt, pas de donations et legs auxquels il faudrait même dire “merci”. Nous ne voulons pas de votre philanthropie, car nous ne voulons pas que les domaines de recherche soient orientés en fonction du bon vouloir des plus fortuné·es. Si vous êtes soucieux d’aider la recherche fondamentale : payez vos impôts, exigez que vos ami·es payent leurs impôts, exigez la fin du Crédit Impôt Recherche (CIR) qui coûtent à la recherche publique 6 milliards d’euros par an !
    6 milliards soit 2 fois le budget du CNRS !
  • Qu’on arrête de tout mélanger sous couvert d’efficacité et de cohérence pour se retrouver avec les mêmes dirigeant·es à la tête de la Fondation privée ICM et de L’Unité de Recherche Publique.
  • Qu’on arrête de nous faire miroiter les bienfaits de la Start-Up Nation, et des incubateurs où la recherche publique se met au service de la rentabilité et du “faire du fric” avec des conflits d’intérêt qui n’offusquent plus personne.
  • Qu’on arrête de nous parler d’excellence et de flexibilité, qui sont souvent des cache-sexes de Lobbying Éditorial et Souffrance au Travail.

Au ruissellement on y croit pas, aux premiers de cordée non plus :

Nous sommes convaincu·es que, parmi vous, travailleuses et travailleurs de ce beau Monolithe “Bling Bling”, il y en a qui ne se retrouvent pas dans ce que les dirigeant·es veulent faire de la recherche publique. Leur modèle est perdant tant pour les conditions de travail imposées, mais aussi pour la qualité de la recherche. Le sous-financement de la recherche publique, le pilotage par appels d’offre, les ANRs, les ERCs, vous pourrissent la vie et vous empêchent d’exercer votre métier.

Ce modèle c’est celui qui a fait que les collègues travaillant sur les coronavirus, parce que cela n’était plus jugé assez sexy et tendance, se sont vu sucrer leurs financements. La science ne marche pas dans l’urgence et la réponse immédiate. Elle ne doit pas marcher non plus selon le flair des investisseurs privés.

Nous vous invitons à lever les yeux de vos expériences,
à vous organiser,
à débattre,
à lutter !

Après le succès de la manifestation du 5 mars, où l’université et la recherche se sont arrêtées, nous réitérons nos revendications :

  • Nous exigeons que soit mis en œuvre dès 2020 un plan d’urgence pour l’université et la recherche.
  • Nous exigeons des titularisations et des recrutements massifs, à la hauteur des besoins ; des financements pérennes pour assurer à tou·tes de bonnes conditions de travail, d’étude et de vie ; des garanties sur la sécurité juridique des étrangèr·es.

Ainsi seulement nous pourrons créer une université démocratique, gratuite, antisexiste, antiraciste, émancipatrice et ouverte à toutes et tous.
L’université doit être un service public, qui ne doit ni sélectionner, ni accroître ou légitimer les inégalités.
La recherche doit être un service public, en capacité de produire des savoirs d’intérêt général.
Nous allons les refonder, avec vous !

Après cette dernière envolée, je vous souhaite, au noms de La Part Précaire de la Recherche un bon cocktail !

Nous : on se lève et on se casse !

A bientôt dans la lutte.

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