On imaginait avoir atteint le pire. Mais c’était sans compter sur Frédérique Vidal, ministre fantomatique depuis le début de la crise sanitaire, resurgissant du néant pour attaquer de nouveau l’enseignement supérieur et la recherche, après la LPR et après « Bienvenue en France » , qui a pour objectif de faire disparaître les étudiant·es étranger·es les plus démuni·es des universités, véritable cheval de Troie préparant le terrain à une marchandisation qui risque de concerner demain l’ensemble des étudiant·es.
Plutôt que d’agir face à la précarité et à la détresse étudiante, ou de créer les 6 000 postes d’enseignant·es-chercheur·es nécessaires chaque année, Frédérique Vidal a préféré diffamer la communauté universitaire avec des analogies indignes. Si ces attaques s’inscrivent dans la ligne des lois dites « sécurité globale » et « séparatisme », autoritaristes et racistes, ces éléments discursifs sont aussi stratégiques, cherchant à détourner l’attention des problèmes aussi urgents que structurels. La réaction a été unanime. Une pétition appelant à la démission de Frédérique Vidal, a réuni plus de 22 000 signatures. Le CNRS, la CPU, la CP CNU, des UFR et des laboratoires ont dénoncé, de manière cinglante, l’instrumentalisation de cette pseudo-notion d’islamogauchisme, jetant des collègues en pâture, alors que des sujets de recherche sont moqués dans les médias.
Un cran a encore été franchi, visant à orienter les financements, à diaboliser la pensée critique et à décrédibiliser les méthodes scientifiques des SHS. Cette attaque contre les libertés académiques menace aussi bien l’ensemble de la communauté scientifique que les mouvements antiracistes et féministes, que les collectifs qui luttent contre l’islamophobie et toute forme de discrimination. Enflammées par la chasse aux sorcières orchestrée depuis le gouvernement, des polémiques éclatent, comme à l’IEP de Grenoble, où l’on apprend que les « censurés », sont en fait ceux qui censurent, alors que l’on parle peu des tags fascistes et pétainistes à l’Université de Pau.
Le gouvernement veut bâillonner les recherches et les mouvements d’émancipation sociale. Sa diversion est aussi un « ballon d’essai » et sa stratégique de communication d’extrême droite en vue des échéances électorales à venir est extrêmement dangereuse, à telle point que l’intersyndicale de l’enseignement supérieur et de la recherche, appelle elle-aussi, à la démission de celle qui, depuis un an, n’est déjà plus notre ministre. Alors que le gouvernement débat des questions liées à la jeunesse avec des influenceur·ses, des étudiant·es font la queue par milliers pour se nourrir, tandis que le retour des cours en présentiel à la fac est une promesse mensongère, puisqu’aucun centime n’a été investi pour le faire dans de bonnes conditions sanitaires. Le gouvernement attend patiemment la fin du second semestre pour ne pas avoir à « régler » le problème des universités.
Pendant ce temps les docteur·es sans poste découvrent le nombre ridicule de supports pérennes de maître·sses de conférence mis au concours. Une campagne de recrutement scandaleuse, ne promettant que désespoir et concurrence. De l’autre côté du mur, beaucoup d’enseignant·es titulaires vivent des dilemmes impossibles : fermer des formations ou continuer à embaucher des collègues vacataires et participer à la maltraitance et à l’exploitation organisée dans les universités. Face à cela, la seule réponse c’est l’action commune ! Un collectif appelle les enseignant·es titulaires à rejoindre la lutte avec la campagne « Pas de recrutement, pas de rentrée », pour que cesse l’exploitation des précaires à l’université.
Ne nous laissons pas enfumer par les polémiques, savamment orchestrées par le gouvernement pour détourner le regard des médias et flatter l’extrême droite. Ne laissons pas le gouvernement nous forcer à regarder le doigt plutôt que la lune : le sacrifice de la jeunesse, la précarité étudiante, la précarisation et la destruction toujours plus dramatique du service public de l’ESR. Ce printemps, réactivons nos luttes !
Appel aux mobilisations
- Mardi 16 mars, partout en France (là, ou encore là) ; les organisations syndicales étudiantes appellent à une journée d’action pour forcer le gouvernement à prendre des mesures pour soutenir la jeunesse, touchée de plein fouet par la crise. A Paris la manifestation fera la jonction avec le rassemblement à 16h devant le Sénat, contre la loi sécurité globale.
- Samedi 20 mars, rejoignons la mobilisation contre la réforme de l’assurance chômage, qui refait surface en plaine crise sociale et sanitaire, et qui impactera tou·tes les travailleur·ses de ce pays et les précaires de l’ESR ! Rendez-vous à 13h45 métro école militaire.
- Mercredi 24 mars, rejoignons la Place de la Sorbonne pour un grand repas solidaire, avec des étudiant·es de différentes universités et écoles, des enseignant·es et universitaires, et des travailleur·ses de différents secteurs, pour rompre avec la détresse et l’isolement !
- Jeudi 25 mars à midi, nous nous rendrons toutes et tous devant Matignon, pour déposer la pétition et exiger une fois encore la démission de Frédérique Vidal. A cette occasion, les collectifs et organisations qui défendent notre service public contre sa politique prendront la parole, face à la presse, pour rappeler l’ensemble de nos revendications.
Illustration en Une : photographie d’Université Ouverte prise lors du rassemblement du 26 janvier 2020 à Paris.