La présidente de l’université Paris-Saclay, établissement expérimental lancé au 1er janvier 2020 et navire amiral de la « politique d’excellence », vient de suspendre un professeur des universités en droit, sans même l’entendre, dans l’unique but de l’empêcher de siéger dans un jury d’examen. Il lui est reproché d’avoir mis de trop bonnes notes aux étudiant·es lors d’un examen en ligne, en période de confinement.

La victime de cette décision autoritaire est Jean-Pierre Dubois, professeur de droit public à l’université Paris-Saclay et par ailleurs ancien président de la ligue des droits de l’homme. La présidente Sylvie Retailleau n’a rien trouvé d’autre à lui reprocher qu’un mauvais paramétrage de la plateforme d’examen en ligne. Si ce genre d’erreur peut être caractérisée comme une faute grave conduisant à une suspension en urgence, alors la plupart des enseignant·es devraient refuser d’en organiser, en particulier dans les conditions actuelles, dans l’improvisation et sans formation spécifique.

Or on sait les grandes difficultés de vie, de travail et d’étude d’une partie des étudiant·es dans les conditions du confinement, accentuant les inégalités. Maintenir coûte que coûte les évaluations, alors même que les enseignements sont très fortement dégradés, est pourtant la consigne gouvernementale, que la présidente de l’université Paris-Saclay entend mettre en œuvre avec zèle. Paris 1 est un autre exemple d’acharnement évaluateur, contre les décisions collégiales des élu·es de la Commission de la formation et de la Vie Universitaire (CFVU).

Face à la mobilisation naissante, la présidente a mis fin à la suspension, 48h à peine après l’avoir décidée. Dans les deux cas, il s’agit d’une décision individuelle de la présidente, sans défense, sans dialogue, sans débat. De fait, la présidente, qui se comporte en PDG, s’est donc donné le droit de décider seule qui participe à chaque jury. Autant pour les annonces tonitruantes de transparence et de collégialité de cette nouvelle « université » Paris-Saclay.

Chers et chères collègues,
Afin de préserver les délibérations sur une épreuve et de garantir le traitement équitable des étudiants d’une même unité d’enseignement, j’ai été amenée à prendre une mesure conservatoire de suspension à l’encontre d’un professeur de l’UFR de Droit-Economie-Gestion. Cette décision, n’ayant pas de caractère disciplinaire, a été prise compte-tenu des éléments portés à ma connaissance et de l’imminence du jury dont ce professeur faisait partie.
Cette décision n’était en rien liée à un dysfonctionnement technique de la plate-forme numérique utilisée pour les examens. Dans ces circonstances, la participation du collègue comme membre du jury de délibération s’avérait de nature à possiblement entraver son bon déroulement. Du fait des délais et afin de garantir la validité des délibérations du jury, j’ai estimé nécessaire de suspendre ce collègue. Il a effectué un recours gracieux auprès de moi le 14 mai.
Considérant que ce professeur ne pourra plus siéger au sein de ce jury, j’ai par conséquent décidé de mettre fin à la mesure de suspension prise à son encontre. L’étude des circonstances du déroulement de cette épreuve se poursuit.
Pr Sylvie Retailleau,
Présidente de l’Université Paris-Saclay

2 commentaires sur « Autoritarisme à Saclay »

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