Nous republions ici une version abrégée et modifiée du texte paru dans le carnet Academia et décrivant les débats en séance au sénat, que vous pourrez lire en intégralité ici.

Le Sénat a introduit une attaque sans précédent contre le CNU dans son rôle de gestion collégiale des carrières (en particulier la qualification) et contre les libertés académiques. Les six premiers articles de la loi de programmation de la recherche ont été adoptés hier par le Sénat. En une soirée, les sénateurs et les sénatrices auront délibéré sur l’ensemble de la programmation budgétaire (articles 1 et 2), les chaires de professeurs junior (article 3), les contrats doctoraux de droit privé (article 4), les contrats post-doctoraux (article 5) et les CDI de mission (article 6). Cette étape a suffit à aller bien au-delà de nos pires craintes, comme le font apparaître les modifications du Sénat apportées à la LPR.

Libertés académiques : le début de la fin

L’amendement n° 234 déposé quelques heures à peine avant le début de la séance par Laure Darcos, rapporteuse de la LPR, avec le soutien de la ministre devient l’article 1er A de la loi et affirme que « Les libertés académiques s’exercent dans le respect des valeurs de la République », au premier rang desquelles, a pris soin de préciser Laure Darcos dans son exposé sommaire, figure la laïcité. Dans un contexte où le ministre de l’éducation nationale s’en prend directement aux universitaires sur ce point, c’est une attaque directe contre les libertés académiques, jusqu’à présent uniquement limitées par le droit pénal et par les impératifs scientifiques. Qui décidera si un cours, une publication, sont conformes aux valeurs de la République ?

Fin de la gestion collégiale des carrières des universitaires

L’amendement n° 150 du sénateur Hingray, supprime la qualification par les pairs au niveau national pour devenir professeur·e. La LPR proposait déjà de se passer du CNU pour les profs recruté·es sur les chaires juniors, c’est désormais généralisé. Une expérimentation étend même le dispositif aux maître·sses de conférences.

Cette décision d’apparence administrative permet aux chefs d’établissement de gérer localement les carrières et de récompenser les maître·sses de conférences zélé·es par des postes de professeur. L’étape nationale de qualification par le CNU, une instance collégiale et majoritairement d’élu·es, n’interdisait nullement de reconnaître l’investissement local, pédagogique ou administratif ; il imposait néanmoins un équilibre avec une activité de recherche. En particulier, une Habilitation à Diriger des Recherches (HDR) est nécessaire pour être qualifié·e aux postes de professeur·es, de même qu’un doctorat est nécessaire pour être qualifié·e aux postes de maître·sses de conférences. Supprimer la qualification, c’est sauter l’étape HDR.

Les rapports préparatoires à la LPR, tout comme le projet de loi, étaient terriblement menaçant pour l’Université et la recherche. Le texte de loi s’avère pire. Soutenons les initiatives que ne manquera pas de prendre le CNU en défense de la collégialité et des libertés académiques !

Illustration : Détail d’une photographie de nick damico, lightning, CC BY-SA



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