Le Conseil d’État a récemment consacré l’augmentation des frais d’inscription pour les étudiant·es étrangèr·es extra-européen·nes. L’inutilité et les méfaits de cette réforme inégalitaire et xénophobe ne sont plus à démontrer. Elle n’est hélas pas isolée. Un décret qui change les règles d’attribution des visas long séjour pour les chercheur·ses, passé relativement inaperçu, vient soumettre l’Enseignement Supérieur et la Recherche à une logique toujours plus raciste et capitaliste.

Alors que se termine la campagne de recrutement toujours plus sélective à l’université, les doctorant·es et docteur·es sans postes étrangèr·es renouvellent leurs demandes de visa pour l’année universitaire à venir. Pour beaucoup, l’application du récent décret du 23 janvier 2020 constitue une restriction sévère des conditions d’accès au visa chercheur·se. Le mal nommé visa long séjour (VLS) « passeport talent-chercheur » était, jusqu’à présent, accessible aux doctorant·es et chercheur·ses dont les ressources étaient assurées soit par un contrat salarié (doctoral ou d’Attaché·e Temporaire à l’Enseignement et à la Recherche), soit par une bourse du pays d’origine, soit par des ressources propres (économies, familiales). Les étudiant·es étrangèr·es de licence, master et doctorat peuvent demander un visa « étudiant » et sont tenu·es de justifier des ressources mensuelles d’un montant de 615€ par mois, ce visa permet d’exercer une activité rémunérée réduite qui n’ouvre pas de droits au chômage

Comme l’illustrent le nouveau formulaire (illustration ci-après) et les témoignages de refus qui nous ont été communiqués, la convention d’accueil nécessaire pour demander un visa chercheur ne pourra plus être délivrée aux docteur·es ayant une bourse ou aux chercheur·ses invité·es (non-titulaires) avec d’autres types de ressources. Comme tous les précaires, ielles participent pourtant à faire tourner l’ESR en enseignant et continuant à chercher et publier.

Disposer d’une bourse ou de ressources propres n’est donc plus suffisant pour demander un visa chercheur·se. Cette mesure restreint les droits des chercheur·ses étrangèr·es et exacerbe les situations d’insécurité administrative des personnes non-titulaires et précaires. Dans cet univers de compétitivité mortifère, le privilège d’être épargné·e par la précarité administrative et de rester en France est réservé aux chercheur·ses et doctorant·es disposant d’un contrat (doctoral, post-doctoral ou d’ATER).

Bien qu’aucune donnée ne soit à ce jour disponible pour mesurer l’impact du décret, des refus de renouvellement de visa ont déjà été signalés. Cette mesure xénophobe signifie donc l’expulsion de fait de nombreux·ses docteur·es précaires étrangèr·es.

Si vous êtes concerné·e, envoyez-nous votre témoignage :  precairesesr_temoignages_visa@riseup.net

Mobilisons-nous pour faire connaître les effets de ce décret, refusons l’expulsion de nos camarades chercheur·ses précaires étrangèr·es !

Texte rédigé par membres du collectif des précaires de l’ESR ID,
initialement publié sur le site du collectif.

Illustration en une : image libre en ligne sur pikist.

2 commentaires sur « « Visa Passeport Talent Chercheur » : make ESR xénophobic (yet) again »

  1. Les financements de pays étrangers étant majoritairement sous le SMIC (et accessoirement, le SMIC est-il une rémunération suffisante pour un·e chercheuse ?) et n’incluant pas de protection sociale, est-ce que la cible ne devrait pas être plutôt le manque de financements dignes de la recherche, que ce soit via les établissements qui acceptent des chercheur·ses sans salaire décent ou via Campus France et le Ministère des affaires étrangères et européennes qui soutient ces financements indignes ?

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